1916 - 1945

La Genèse

L’histoire de Dassault Aviation débute avec l’essor de l’aviation à l’aube du XXe siècle. Elle est intimement liée à celle de son fondateur, Marcel Bloch, futur Marcel Dassault, féru d’innovation et d’esthétique dès son plus jeune âge.

Il forge l’ADN qui structure toujours la Société. Les expériences vécues au cours de cette période sont décisives pour comprendre ses valeurs fondamentales et ses réussites.

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La Genèse
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Industriel durant
la grande guerre

Spad VII équipé d’une hélice éclair

Verdun, 1916. La première bataille aérienne de l’histoire fait rage. Des chasseurs Nieuport français sont équipés d’une toute nouvelle hélice simple, robuste, efficace et esthétique qui fait merveille. Elle est baptisée Éclair. Son concepteur, Marcel Bloch, a tout juste 24 ans.

L’année suivante, alors qu’il existe 40 fabricants d’hélices en France et 253 types différents, les services de l’État décident de ne conserver que les trois meilleures : Éclair en fait partie. Elle équipera, en particulier, le Spad VII de l'as français, Georges Guynemer. Ce succès marque le début d’une des aventures industrielles majeures de l’aéronautique mondiale.

L’as français Georges Guynemer devant un Spad VII équipé d’une hélice Éclair.

Un jour, en récréation, dans la cour de l’école […], j’ai vu le Wilbur Wright du comte de Lambert doubler la tour Eiffel pour la première fois.

Je n’avais jamais vu d’avion et j’ai compris que l’aviation était entrée dans mon esprit et dans mon coeur.

Marcel Dassault

Marcel Bloch, vers 1910.

Marcel Bloch

Né le 22 janvier 1892 à Paris, passionné par les exploits des aviateurs du début du siècle, Marcel Bloch sort diplômé de l'École supérieure d'aéronautique en 1913.

Durant son service militaire, il est affecté au Laboratoire aéronautique de Chalais-Meudon.

Au début de la Première Guerre mondiale, il est chargé par ses supérieurs, en compagnie d’Henri Potez, de coordonner la fabrication des avions de reconnaissance Caudron G-3 dont la production est répartie entre plusieurs constructeurs de renom.

SEA IV, chasseur biplace, au sol avec hélice Éclair. © Dassault Aviation - DR

Le SEA IV et son hélice Éclair choisis par l'armée

C’est alors qu’il dessine l’hélice Éclair et la fait fabriquer par des ébénistes parisiens. Cette première expérience de constructeur lui permet de se familiariser avec les problèmes de production.

Il prend connaissance des caractéristiques de nombreux avions, les constructeurs lui confiant toutes les données techniques de leurs appareils.

Marcel Bloch décide alors, en collaboration avec ses amis Potez et Coroller, de se lancer dans la construction d'avions.

Ils fondent, le 1er juillet 1917, la Société d'Études Aéronautiques (SEA) et proposent à l'armée un biplace de chasse et de reconnaissance, le SEA IV, qui est commandé à un millier d’exemplaires.

La fin de la guerre survenant peu après le démarrage de la série, l'avion n'est finalement construit qu'à 115 exemplaires. Marcel Bloch se lance donc dans la fabrique de meubles et dans l’immobilier en attendant des jours meilleurs.

Le SEA IV équipe la 11ᵉ escadrille.

La guerre que nous avions gagnée, et qui nous avait coûté si cher en vies humaines, dans l’esprit de tous était la dernière - d’où l’expression "la der des ders".

Le Service des fabrications de l'aviation nous dit que, si nous le souhaitions, nous pouvions construire des portes, des fenêtres ou des brouettes, mais qu'en tout cas on ne commanderait pas d'avions avant longtemps, et que si un jour on en commandait quelques-uns, ce serait aux grands constructeurs disposant de moyens et d'un personnel importants tels que Voisin, Breguet, Farman et autres.

Marcel Dassault, Le talisman

Le retour à l’aviation civile et militaire

Vidéo du monomoteur sanitaire MB-81.

Créé en 1928, le ministère de l'Air lance une politique de prototypes pour rééquiper le parc aérien français en matériels modernes. Marcel Bloch, enthousiasmé par la traversée de l’Atlantique de Lindbergh en 1927, revient à sa passion, l’aviation.

En 1929, il fonde son propre bureau d'études et propose au ministère de construire un trimoteur postal entièrement métallique, technique innovante à l’époque. Cet avion n'est pas produit en série mais, l'armée ayant besoin d'un trimoteur colonial, une version modifiée est acceptée : le MB-120.

Plan du trimoteur postal MB-60.

Suivent principalement le monomoteur sanitaire MB-81, destiné au transport de blessés, commandé en 1931, des prototypes d’avions de tourisme, les bombardiers bimoteurs MB-200 (1933), MB-210 (1934) et MB-131 (1936).

Marcel Bloch se lance également dans la construction d'avions de transport avec le bimoteur MB-220 (1936) et le quadrimoteur MB-160 (1939), futur Languedoc, qui équipent Air France. En seulement six ans, il devient le deuxième constructeur aéronautique français.

MB 60, prototype de trimoteur postal, au sol devant un hangar. © Dassault Aviation - DR

Vous me proposiez un avion harmonieusement dessiné et de construction entièrement métallique, et vous évaluiez avec maîtrise et précision toutes ses caractéristiques. Vous-même déterminiez, comme je le fis toujours moi-même, toute la physionomie de la réalisation, ce qui me parut le fait d'un éminent constructeur de grand avenir en aviation.

Albert Caquot

directeur général technique du ministère de l’Air en 1928, à propos du MB-60.

© Dassault Aviation - DR

La réussite de Marcel Bloch est patente dans les avions de combat. Les MB-151, 152 et 155 sont fabriqués à 750 exemplaires. Sa société donne aussi naissance à des bombardiers légers et à des avions d'assaut bimoteurs, les MB-174 et 175, qui sont commandés à 1 000 exemplaires. L’issue rapide de la bataille de France limite leur livraison.

Plans du MB-174. © Dassault Aviation - DR

Un MB-174 aux mains du capitaine Antoine de Saint-Exupéry

Construits par la SNCASO de novembre 1939 à mai 1940, les MB-174 sont assemblés à Mérignac. Après renforcement de leur armement, les premiers avions disponibles sont livrés en mars au GR II/33 et, le 29 mars, le capitaine de Saint-Exupéry effectue une des premières missions de guerre sur MB-174. Il s’en inspirera pour écrire son célèbre ouvrage “Pilote de guerre”.

MB-174 au sol. © Dassault Aviation - DR

La production des différents types d’appareils est répartie, sous licence, entre plusieurs constructeurs, afin d’assurer leur plan de charge. Les MB-200, MB-210 et MB-152 sont exportés. En tout, environ 1 800 avions Bloch civils et militaires sont construits avant la seconde guerre mondiale.

Les principaux avions Bloch

En seulement six ans, de 1930 à 1935, Marcel Bloch devient le deuxième constructeur aéronautique français. Grâce à son intense activité et à son inventivité, il investit la plupart des champs de l'aviation civile et militaire. Cette dualité lui permet d'utiliser des solutions techniques innovantes d'un avion à l'autre. De 1930 à 1940, 1 800 avions Bloch sont produits.

© Dassault Aviation - DR

MB-80

Réalisé suivant un marché d’État, le MB-80 effectue son premier vol au début de l’été 1932 à Villacoublay, piloté par Zacharie Heu. Monoplan à ailes basses entièrement métallique, il peut atteindre la vitesse de 190 km/h et l’altitude de 6 400 mètres, et est capable de décoller en 70 mètres et d’atterrir en 95 mètres. A l’automne 1932, le MB-80 effectua, en un jour et demi, 209 atterrissages sans le moindre problème.

Cet appareil a été réalisé pour permettre d’aller chercher des malades ou des blessés en utilisant des terrains de fortune, de petites dimensions, qui pouvaient même se trouver à des altitudes élevées, dans les périodes d’opérations militaires, en pays de montagne, comme c’était le cas au Maroc, dans l’Atlas.

© Dassault Aviation - DR

MB-200

En 1932, Marcel Bloch répond au programme français de bombardiers de nuit. Il présente le MB-200. C’est, dans ses grandes lignes, le trimoteur de transport MB-120 militarisé et amélioré. Plus de 200 sont produits.

Le MB-200 permet à la société Bloch de remporter son premier marché à l’exportation. En 1935, la Tchécoslovaquie achète la licence de fabrication de l’avion qu’elle équipe de moteurs tchèques. Elle fabrique 114 appareils avant l’annexion allemande de 1938.

© Dassault Aviation - DR

MB-220

Cet appareil effectue son premier vol en 1936. C’est une extrapolation civile du bombardier MB-210.
Utilisé sur les lignes européennes d’Air France, c’est un avion très confortable destiné au transport de seize passagers. Grâce à lui, la Société, déjà bien implantée dans le domaine militaire, assoit définitivement son activité dans le domaine de l’aviation civile.

© Dassault Aviation - DR

MB-152

Le MB-152 est un appareil solide, capable de supporter beaucoup de dommages, et qui constitue une plate-forme de tir très stable.

Le groupe de chasse GC II /1 a organisé une confrontation avec des Morane 406 :

« Les exercices de montée et de vitesse sont favorables au Bloch. Qu’est-ce qu’on avait donc à se plaindre ? On ne se rendait pas compte du trésor que nous possédions. »

SH AA, G7/785, Journal de marche du groupe de chasse GC II /1.

Selon les décomptes officiels, les MB -152 de l’armée de l’air ont, durant la bataille de France de 1940, remporté 159 victoires pour 94 appareils perdus au combat.

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Nuit et brouillard

Vidéo du MB-220, bimoteur de transport.

Dès 1930, Marcel Bloch s’entoure d’une équipe de jeunes ingénieurs dévoués corps et âme à ce patron charismatique.

Soucieux du bien-être de ses ouvriers, il leur accorde une semaine de congés payés dès 1935. La politique sociale de la Société sera toujours en avance par rapport à celle de l’ensemble de l’industrie.

L’année suivante, lors des nationalisations de l'industrie aéronautique, les usines Bloch sont incorporées dans la nouvelle Société Nationale de Construction Aéronautique du Sud Ouest (SNCASO) dont il devient administrateur délégué. Il occupe cette fonction jusqu’en janvier 1940. En parallèle, pour continuer ses activités de conception, il établit un bureau d’études indépendant.

© Service historique de la Défense, Vincennes

Chaudronniers travaillant à la construction du MB-152.

Marcel Bloch a compris qu’une usine moderne ne doit pas produire comme une usine du XIXe siècle. Il croit aux idées sociales qui vont dans le sens de son réalisme industriel. Pour lui, le bien-être des ouvriers est une priorité. En 1935, il est l’un des premiers, en France, à leur accorder une semaine de congés payés.
Germaine de Vaucresson, sa cousine, a connu ses ouvriers : « Ils l’estimaient tous. Ils disaient que c’était un patron intelligent et valable, dur mais juste, généreux, qui savait récompenser les mérites de chacun. »

© Service historique de la Défense, Vincennes

Chaudronniers travaillant à la construction du MB-152.

Marcel Bloch a compris qu’une usine moderne ne doit pas produire comme une usine du XIXe siècle. Il croit aux idées sociales qui vont dans le sens de son réalisme industriel. Pour lui, le bien-être des ouvriers est une priorité. En 1935, il est l’un des premiers, en France, à leur accorder une semaine de congés payés.
Germaine de Vaucresson, sa cousine, a connu ses ouvriers : « Ils l’estimaient tous. Ils disaient que c’était un patron intelligent et valable, dur mais juste, généreux, qui savait récompenser les mérites de chacun. »

© Dassault Aviation - DR

La chaîne de production de MB-152 à l’usine SNCASO de Châteauroux-Déols.

La production du MB-152 est répartie entre les différentes usines de la SNCASO. Il est vraisemblable que, entre 1938 et 1940, près de 700 appareils MB-151 et MB-152 ont été produits et livrés à l’armée de l’air et à la Marine nationale, soit une cadence moyenne de 25 appareils par mois.

© Dassault Aviation - DR

Dans l'immédiat après-guerre, la façade de l'usine Bloch de Saint-Cloud.

Issu de la victoire du Front populaire en mai 1936, le gouvernement de Léon Blum souhaite contrôler la fabrication des matériels de guerre destinés aux besoins de la Défense nationale. Sa société de construction aéronautique ayant été nationalisée, Marcel Bloch n’a plus le droit de produire des avions en série.

Il décide de créer la société anonyme des avions Marcel Bloch, qui se livre à d’autres activités industrielles, comme la fabrication d’hélices et de moteurs.

© Dassault Aviation - DR

L’usine Marcel Bloch, à Courbevoie, en 1938.

L’usine connaît une grande activité, constatée par le journal aéronautique "L’Air" :

« Bien secondé par des éléments actifs et jeunes, Marcel Bloch possède une usine dont le visiteur sort impressionné ; il ne s’attendait pas à trouver derrière cette façade tranquille, une affaire industrielle aussi active, aussi bourdonnante. » L’Air, n° 433, 15 septembre 1933.

© Dassault Aviation - DR

En 1945, Benno-Claude Vallières est décoré pour services rendus au sein des commandos SAS anglais.

De nombreux collaborateurs choisis par Marcel Bloch dans les années 1930 font preuve de bravoure durant la seconde guerre mondiale, notamment Benno-Claude Vallières, futur P.-D.G., et Henri Déplante, futur directeur général technique, qui servent dans les commandos Special Air Service (SAS) britanniques, ainsi que Xavier d’Iribarne, futur responsable de la production, organisateur de la logistique de la 1ère division blindée.

Vidéo du MB-480, entièrement métallique et monté sur flotteur.
Marcel Bloch, déporté à Buchenwald d’août 1944 à avril 1945.

En octobre 1940, Marcel Bloch est emprisonné par le gouvernement de Vichy. Ses biens sont mis sous séquestre.

Patriote, refusant obstinément de travailler pour l'occupant, il est déporté par les nazis à Buchenwald.

Malade, il réussit toutefois à survivre, grâce à une organisation communiste clandestine, jusqu'à la libération du camp en avril 1945.

Durant cette période difficile, Marcel Bloch, convaincu de la victoire finale des Alliés, ne cesse d'étudier et de concevoir des avions car il n’a qu’un seul but : recommencer à produire après la guerre.

Interné au fort de Montluc en 1944, Marcel Bloch paraissait aussi peu fait que possible pour résister au régime d’une prison particulièrement inhospitalière où l’on mourait beaucoup.

Mais c’était un roseau à tige d’acier, flexible, résistant, d’une trempe exceptionnelle. […]

Il était flegmatique, impavide, serein, répétant à longueur de journée : dans l’adversité, soyons forts, et il était fort. C’était ça son comportement. Vraiment impossible à troubler, avec un optimisme raisonné, parce qu’il pensait vraiment que les Allemands perdraient la guerre.

André Frossard Journaliste, essayiste et académicien

1945 - 1975

Les années magiques

Hélice Éclair

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